Le développement peut-il être durable ?

Dans un monde aux ressources limitées, le « développement » et la croissance sont-ils compatibles avec le concept de « durabilité » ?  

 

  1. C’est quoi le développement durable ? 
  2. Les limites du développement durable 
  3. Certains secteurs doivent-ils décroître pour laisser d’autres se développer durablement ? 
  4. Développement durable et dissonance cognitive 
  5. Soutenir la transition écologique avec le financement participatif 

 

C’est quoi le développement durable ? 

Le « développement durable » est un concept qui cherche à équilibrer les impératifs environnementaux, économiques et sociaux. Cette notion est née de la prise de conscience croissante des impacts environnementaux de l'activité humaine et de la nécessité d'une approche intégrée pour promouvoir une croissance économique soutenable et équitable. 

 

 

Historiquement, le développement durable prend racine dans les débats environnementaux des années 1960 et 1970, marqués par des publications influentes telles que Printemps silencieux de Rachel Carson en 1962, qui a exposé les effets néfastes des pesticides sur l'environnement.  

Cependant, c'est le rapport Brundtland de 1987, officiellement intitulé Notre avenir à tous, rédigé par la Commission mondiale sur l'environnement et le développement des Nations Unies, qui a véritablement cristallisé le concept de développement durable. Ce rapport définit le développement durable comme « un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ». 

Depuis lors, le développement durable a évolué pour inclure non seulement la protection de l'environnement, mais aussi l’équité sociale et économique. Les Objectifs de développement durable (ODD) adoptés par les Nations Unies en 2015 1 en sont un exemple éloquent. Ces 17 objectifs visent à aborder des enjeux globaux tels que la pauvreté, l'inégalité, le changement climatique, la dégradation de l'environnement, la paix et la justice : 

 

 

 

Les limites du développement durable  

Malgré sa large acceptation, le concept de développement durable fait l'objet de critiques. Certains auteurs, tels que William E. Rees, le co-créateur de l'empreinte écologique, argumentent que le développement durable, tel qu'il est mis en œuvre dans la réalité, ne remet pas suffisamment en question les modèles de consommation et de production jugés insoutenables.  

D'autres, comme Arturo Escobar, un anthropologue colombien, critiquent le développement durable pour son ethnocentrisme et son incapacité à prendre en compte les diversités culturelles dans les pratiques de développement. Dans son ouvrage Encountering Development: The Making and Unmaking of the Third World (1995), Escobar analyse la manière dont le développement a été construit comme un discours dominant, qui définit les pays « sous-développés » ou « en développement » en termes de manques et de déficits par rapport à l'Occident.  

Cette perspective, selon lui, a conduit à un modèle de développement qui impose des valeurs occidentales, notamment le capitalisme et la modernisation, comme étant universellement désirables et nécessaires pour le progrès. De plus, il argue que ce processus a souvent entraîné l'érosion des cultures locales, la perte de biodiversité, et la marginalisation des savoirs et des modes de vie autochtones. 

 

 

S'agissant spécifiquement du développement durable, Escobar est critique à l'égard de la manière dont ce concept a été intégré dans le discours du développement. Pour lui, le « développement durable » reste trop souvent ancré dans les paradigmes du développement conventionnel, c'est-à-dire qu'il continue de privilégier la croissance économique et l'exploitation des ressources, tout en tentant simplement de minimiser les dommages environnementaux ou sociaux. 

 

Escobar plaide pour une approche plus radicale et transformative, qui va au-delà de la simple atténuation des impacts négatifs du développement. Il appelle à une reconsidération des modes de vie, des systèmes de valeurs, et des structures économiques et politiques.

 

Cela implique d'écouter et de valoriser les connaissances et les pratiques des communautés locales, notamment celles des peuples autochtones, et de reconnaître la pluralité des modes de vie et des conceptions du bien-être. 

En complément, des auteurs comme Naomi Klein ont souligné que le capitalisme dans sa forme actuelle est intrinsèquement en conflit avec les principes mêmes du développement durable. Selon cette perspective, les impératifs de croissance et de profit à court terme du capitalisme sont souvent en désaccord avec les objectifs à long terme de préservation de l'environnement et d'équité sociale.  

Selon Klein toujours, le capitalisme, en particulier dans sa forme néolibérale, repose sur une croissance économique constante, une consommation accrue et une quête incessante de profit. Cette dynamique, argumente-t-elle, conduit inévitablement à l'exploitation des ressources naturelles et humaines, souvent sans considération suffisante pour les impacts environnementaux ou sociaux à long terme.

Klein souligne que cette approche est fondamentalement incompatible avec le concept de durabilité, qui nécessite une gestion prudente et équilibrée des ressources, ainsi qu'une attention aux impacts écologiques et sociaux. 

 

Développement durable et dissonance cognitive 

La dissonance cognitive est un concept psychologique développé dans les années 1950 par le psychologue américain Leon Festinger. Il décrit un état de tension psychologique ou de malaise qui survient lorsqu'une personne tient simultanément deux cognitions (c'est-à-dire des pensées, croyances, opinions ou attitudes) contradictoires, ou lorsque son comportement est en désaccord avec ses convictions. Par exemple, si une personne se considère comme soucieuse de l'environnement mais continue à utiliser fréquemment des moyens de transport polluants, elle peut éprouver une dissonance cognitive. 

 

 

Dans le cadre du développement durable, la dissonance cognitive peut se manifester de diverses manières. Les individus sont de plus en plus conscients des enjeux environnementaux, tels que le changement climatique, la pollution, la perte de biodiversité, etc., et reconnaissent la nécessité d'agir de manière durable.

Cependant, il peut y avoir un écart notable entre cette prise de conscience et leurs actions quotidiennes.

 

 

 

Il est donc crucial d'aborder les problèmes environnementaux de manière qui tienne compte des valeurs, des croyances et des circonstances des individus. Cela implique d'encourager non seulement la prise de conscience et le rapport à la nature, mais aussi de fournir des alternatives pratiques et accessibles qui permettent aux gens d'aligner plus facilement leurs actions avec leurs convictions environnementales. 

 

Financez la transition écologique avec Lumo

 

 

Certains secteurs doivent-ils décroître pour laisser d’autres se développer durablement ? 
 

La décroissance est un concept qui remet en question l'idéal de croissance économique continue et propose une réduction volontaire et ciblée de la production et de la consommation dans les sociétés industrialisées. Ce concept s'inscrit dans le cadre d'une critique plus large du capitalisme et de la mondialisation, soulignant les limites écologiques, sociales et économiques de la poursuite incessante de la croissance. 

D'un côté, la transition écologique que nous observons aujourd'hui se manifeste par une augmentation de l'utilisation des énergies renouvelables, une décarbonation des pratiques, une préservation des ressources et de la biodiversité et une innovation dans les matériaux écologiquement responsables.

 

Ces développements sont souvent perçus comme des pas positifs vers un avenir plus durable. Cependant, cette phase d'accumulation peut être vue comme une tentative d'ajouter des solutions écologiques à un système existant, sans nécessairement remettre en question ou modifier les fondements de ce système. Et, inexorablement, nous continuons de « croître » dans un environnement qui outrepasse déjà ses limites. 2 

 

Le Climat : la partie immergée de l'iceberg

 

Et le secteur de l’énergie en est le parfait exemple. Souvent désignée sous le terme de « transition énergétique », la période actuelle ressemble bien plus à une phase d'accumulation des sources d'énergie. En effet, si les énergies renouvelables ne cessent de croître, la consommation mondiale de charbon et de pétrole atteint, en parallèle, des niveaux record. 

 

 

Pour en savoir plus : Existe-t'il un équilibre entre la rentabilité et la responsabilité environnementale dans les projets éco-responsables ? 

 

Les secteurs nécessitant une décroissance sont généralement ceux qui ont un impact environnemental négatif significatif, consomment de grandes quantités de ressources non renouvelables, émettent des niveaux élevés de gaz à effet de serre, et contribuent à la dégradation de la biodiversité et à l'épuisement des ressources naturelles. L’industrie des combustibles fossiles (pétrole, charbon, gaz naturel) est fréquemment citée comme un secteur devant décroître rapidement et drastiquement.  

En effet, la combustion de ces ressources est l'une des principales sources d'émissions de CO2e, contribuant de manière significative au réchauffement climatique. En outre, le secteur de l'agriculture intensive, en raison de son utilisation excessive d'eau, de pesticides et d'engrais chimiques, a également un impact négatif sur les écosystèmes et la santé humaine, suggérant une nécessité de réorientation vers des pratiques réellement durables.  

 

 

Le développement des énergies renouvelables ainsi que l’électrification des usages impliquent eux aussi, en amont, certaines activités très polluantes et gourmandes en eau comme l’extraction minière afin d’obtenir les matières premières nécessaires à leur fabrication. Il est donc primordial, de décarboner autant que faire se peut, ces industries en amont et, bien entendu, de les intégrer dans le calcul de leur empreinte carbone.  

 

C’est d’ailleurs déjà le cas pour des énergies comme le solaire ou l’éolien qui, si l’on prend en compte tout leur cycle de vie (de la fabrication au recyclage), restent largement moins polluantes que les énergies fossiles. Voilà pourquoi les énergies renouvelables sont intéressantes à condition seulement de baisser notre consommation globale en énergie (et non de l’augmenter constamment).3 

 

Cette approche est souvent associée à la notion de « découplage » entre la croissance économique et la durabilité. C’est ce que défend l’économiste américain Herman Daly et ses principes d’économie « steadienne ». L'un des principaux éléments de l'économie steadienne est le rejet de l'objectif de croissance économique perpétuelle. Au lieu de cela, l'accent est mis sur la stabilisation de l'économie à un niveau où elle est en équilibre avec les capacités de la biosphère à fournir des ressources et à absorber les déchets.  

Dans une économie steadienne, la taille de l'économie reste relativement constante une fois que l'équilibre est atteint (pas de croissance infinie donc), éliminant ainsi la pression constante sur la demande de ressources naturelles. Les ressources sont utilisées de manière durable, ce qui signifie qu'elles sont extraites à un rythme compatible avec leur régénération naturelle, et les déchets sont traités de manière à minimiser leur impact sur l'environnement. L'efficacité énergétique et la réduction du gaspillage deviennent ainsi des priorités. 

L’autre pilier essentiel de l'économie steadienne est l'idée d'une économie de flux circulaires. Cela signifie que les matériaux et les ressources sont utilisés de manière à minimiser les déchets et les émissions. Les produits sont conçus pour être réparables, réutilisables et recyclables, ce qui réduit la nécessité d'extraire constamment de nouvelles ressources.

D'autres penseurs, plus radicaux, prédisent que la décroissance sera volontaire ou subie mais qu'elle finira par arriver et que le découplage entre notre système économique et la préservation de l'environnement est impossible : 

« Un taux de croissance annuel de 2% équivaut à une multiplication par sept tous les siècles. Ce rythme a certes été largement dépassé sur une durée d'un peu plus de deux siècles, depuis les prémices de la révolution industrielle. Mais le maintenir, c'est une autre paire de manches : sur un millénaire, cela signifie une multpilisation par presque 400 millions !

Cela veut dire, par exemple, qu'en consommant 2% supplémentaire chaque année, nous aurions besoin, dans 1550 ans, de la puissance totale de l'étoile solaire. (...) Le même raisonnement par l'absurde pourrait être appliqué aux ressources minérales : à ce même taux de croissance, il ne faudrait que huit ou neuf siècles pour venir à bout du fer de la ceinture d'asteroïdes, ou cinq siècles pour consommer les quelques 20 000 milliards de tonnes de cuivre contenues dans la croûte terrestre jusqu'à la profondeur d'un kilomètre » 4.

 

Soutenir la transition écologique avec le financement participatif  

En attendant que se développent pleinement les secteurs durables indépendamment des secteurs les plus polluants, votre épargne peut faire la différence ! Car, vous ne le savez peut-être pas mais, laissez son argent dormir peut ralentir la transition écologique 

Le financement participatif, ou crowdfunding, offre un moyen innovant et de plus en plus populaire pour soutenir des projets écologiques. Cette approche démocratise le financement de tels projets en permettant à des individus de contribuer directement à des initiatives qui leur tiennent à cœur. Les projets écologiques peuvent utiliser cette plateforme pour sensibiliser et engager la communauté sur des questions environnementales. En partageant leur vision et leurs objectifs, les porteurs de projet peuvent créer une connexion émotionnelle avec les contributeurs, encourageant ainsi un soutien financier et moral. 

 

Soutenir des projets durables avec Lumo

 

Beaucoup de projets écologiques innovants peinent à obtenir un financement traditionnel en raison de leur nature expérimentale ou de leur manque de garanties commerciales. Le crowdfunding permet à ces projets de contourner les voies de financement traditionnelles et de faire appel directement à une base de contributeurs intéressés par l'innovation écologique. 

 

Les projets qui réussissent à mobiliser un soutien significatif via le financement participatif gagnent souvent en visibilité et en crédibilité. Cela peut attirer l'attention des médias, des investisseurs plus importants, ou même des partenaires stratégiques, amplifiant l'impact du projet. 

 

Pour maximiser l'impact du financement participatif en faveur de l'écologie, il est essentiel de bien communiquer sur l'importance et l'urgence des problèmes environnementaux que le projet vise à adresser. De plus, la transparence concernant l'utilisation des fonds et les progrès du projet est cruciale pour maintenir la confiance et l'engagement des contributeurs.

 


Sources :1 https://www.un.org/sustainabledevelopment/fr/objectifs-de-developpement-durable/2 https://bonpote.com/la-6eme-limite-planetaire-est-officiellement-depassee/3 https://base-empreinte.ademe.fr/

4 La Décroissance est-elle (encore) techniquement possible ? par Philippe Bihouix, paru dans Décroissances, 2023.

Qui sommes-nous ?

Lumo, la plateforme de financement participatif qui met en lumière votre épargne !

Notre objectif : Relever le défi climatique et construire ensemble un avenir durable.

Notre mission : Permettre à chacun d’accélérer la transition écologique en finançant des projets à impact positif.

A découvrir sur Lumo

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